Une ville où il ne pleut jamais
Gare Maritime, Neutelings Riedijk - Jan de Moffarts, Bruxelles
A+293 Brussels Architecture Prize
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Avec cette gare de marchandises – la plus grande d’Europe ! –, la Belgique de 1902 voulait montrer aux yeux du monde non seulement ses ambitions économiques, mais aussi ses talents en ingénierie. Cet impressionnant bâtiment a été conçu par l’ingénieur Frédéric Bruneel, spécialiste du chemin de fer, qui allait ultérieurement jouer un rôle important dans la jonction Nord-Midi à Bruxelles. Longue de 280 m et large de 140 m, la Gare maritime compte trois grands hangars d’une portée de 26 m et quatre hangars plus petits dont la largeur varie de 12 à 16 m. Côté rue Picard, la Gare maritime est reliée à l’Hôtel de la Poste et au Dépôt des colis. La structure portante des hangars se compose de séries de membrures cintrées à triple charnière. Le pied et le sommet de ces membrures sont dotés de charnières permettant d’absorber les mouvements de la structure en acier. Celle-ci, conçue et décorée dans le style Art nouveau qui voyait le jour à cette époque, se caractérisait par une approche de l’ornementation sous l’angle de l’ingénierie. Chaque ornement a une fonction. Par exemple, les raccords obliques au niveau des gouttières permettent d’absorber les contraintes transversales.
La gare d’Anvers et la Gare maritime sont les deux derniers édifices survivants de cette époque ayant conservé leur couverture d’origine. En revanche, la structure et la composition des façades principales et latérales ainsi que la plupart des ornements n’ont pas survécu aux rénovations successives entreprises par la SNCB au cours du petit siècle où elle a assuré la gestion du bâtiment.
Lorsqu’Extensa a racheté le site de Tours & Taxis, l’édifice était en piteux état. Le premier défi consistait donc à réhabiliter cette ruine industrielle. L’architecte Jan De Moffarts et Bureau Bouwtechniek se sont vu confier la mission de rénovation de la structure en acier, des façades et des toitures du bâtiment, et de développer une vision pour l’organisation à l’intérieur des sept halles.
En compagnie de la professeure Inge Bertels (VUB), ils ont plongé dans les abondantes archives laissées par la SNCB et y ont trouvé des centaines de plans reprenant avec précision chaque détail de construction et montrant la portée de la valeur historique de cette gare d’exception. Sur la base de cette étude historique et en collaboration avec le bureau d’ingénieurs Ney & Partners, il fut décidé de rétablir la structure et la composition initiales, sans toutefois reproduire l’ensemble des ornements d’origine. Pour mettre les halles aux normes actuelles en matière de ventilation et d’évacuation des fumées, Studiebureau Boydens a voulu intégrer 400 m2 de fenêtres à ouverture mécanique dans les façades, et 1.200 m2 dans la toiture. Pour Jan De Moffarts, l’intégration de ces éléments contemporains s’est précisément révélée être un instrument intéressant dans le processus de restauration : « Nous avons utilisé les nouveaux éléments pour reconstituer la composition originale, tant dans les façades latérales que principales, où nous avons chaque fois repris trois fenêtres de la composition originale sans perturber la verticalité. Étant donné que pour satisfaire à la législation PEB, les nouvelles parties devaient être isolées, nous avons fait produire de nouvelles briques de parement ayant la même forme décorative que l’ancien modèle. Par ailleurs, nous avons pu récupérer les éléments en ardoise démolis à certains endroits pour rénover la façade principale. » Jan De Moffarts et Bureau Bouwtechniek ont également redessiné les axes à l’intérieur des halles pour les relier aux lignes de force du site.
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